Les épisodes de canicule exposent les passagers des trains brésiliens à un risque insidieux : les températures extrêmes peuvent entraîner la déformation des rails, augmentant le danger de déraillements, comme celui survenu récemment à Rio de Janeiro.
Pour contrer ce problème, l’entreprise de transport ferroviaire ViaMobilidade, opérant à São Paulo, a adopté une solution innovante : peindre les rails en blanc afin de réfléchir la lumière solaire et ainsi réduire la chaleur absorbée par l’acier.
Rails dilatés par la chaleur
Selon un ingénieur responsable de la maintenance chez ViaMobilidade, les rails peuvent atteindre des températures allant jusqu’à 60 °C, ce qui risque de provoquer des déformations dangereuses. L’année dernière, l’entreprise a identifié vingt zones sur ses lignes où les rails présentaient des signes de déformation durant les périodes de forte chaleur.
Le 20 février dernier, des rails chauffés à 71 °C par le soleil se sont déformés par dilatation, causant le déraillement d’un train dans l’État de Rio de Janeiro, selon le concessionnaire SuperVia. Heureusement, cet incident n’a fait aucun blessé.
Comme ailleurs sur la planète, le Brésil a connu en 2024 son année la plus chaude depuis le début des relevés, une situation attribuée au changement climatique par les scientifiques.
Peinture à l’eau
L’idée de peindre les rails en blanc pour réduire leur température a été expérimentée dans plusieurs pays. ViaMobilidade affirme que ses tests ont démontré que cette technique peut abaisser la température des rails jusqu’à 6 °C, les couleurs claires retenant moins la chaleur. Bien que cette méthode n’élimine pas totalement les effets de la chaleur, elle contribue à les atténuer.
L’entreprise prévoit de peindre 35 km de voies ferrées d’ici la fin février. Pour ce faire, un véhicule équipé de pulvérisateurs applique une peinture à base d’eau sur les côtés des rails.
Expériences internationales
Cette approche a également été adoptée par d’autres pays. En Allemagne, Deutsche Bahn a peint un kilomètre de rails en blanc sur la ligne Hanovre-Würzburg pour les protéger des fortes chaleurs. Les résultats de ce test détermineront l’éventuelle extension du projet à d’autres itinéraires.
En Belgique, Infrabel a testé cette technique en appliquant 1000 litres de peinture blanche sur 14 km de voies dans les provinces de Liège et de Namur.
Cependant, l’efficacité de cette méthode est sujette à débat. Les Chemins de fer fédéraux suisses (CFF) ont abandonné cette pratique après des tests concluants que la peinture blanche n’avait pas d’effet significatif sur la température des rails, selon RTS.
Dans le plus grand pays d’Amérique latine, le transport ferroviaire est peu développé pour les longues distances, mais répandu dans les grandes agglomérations. Le Brésil dispose d’un réseau ferroviaire d’environ 30 000 km, mais moins de 20 % de ce réseau est réellement exploité. Le système ferroviaire a été construit principalement au XIXe et début du XXe siècle pour desservir les zones minières et agricoles, notamment dans le Sud-Est et le Centre-Ouest. Entre 1870 et 1930, les chemins de fer brésiliens étaient principalement chargés de transporter la production agricole brésilienne, en particulier le café, de l’intérieur du pays vers les ports et de là vers le transport maritime à longue distance
Au fil du temps, l’accent a été mis sur le transport routier, notamment après les années 1950 sous les gouvernements de Kubitschek et suivants. Dans les années 1990, sous l’influence des réformes néolibérales, le réseau ferroviaire a été privatisé : il est désormais géré par des concessions régionales. Cela a favorisé le développement du fret, surtout pour les matières premières (minerai de fer, soja, céréales, etc.), mais a laissé de côté le transport de passagers, jugé peu rentable.
Sources : Globo Brasil, grupo Jovem Pan, archives personnelles.