Qui est Juan José Zúñiga, le général et l’auteur présumé de la tentative de coup d’État manqué ?
Le général et ancien commandant de l’armée est accusé d’être l’auteur de la tentative de coup d’État. Il a été destitué et arrêté. Mais avant d’être arrêté, le général Zúñiga a soutenu devant les journalistes avoir agi sur ordre du président Arce, qui lui aurait demandé dimanche de « préparer quelque chose » pour rehausser sa cote de popularité.
Dans la journée d’hier mercredi, le général et ses hommes avaient avancé en rangs serrés dans les rues de La Paz jusqu’à la place Murillo, où ils avaient positionné huit véhicules blindés et lancé des gaz lacrymogènes sur toute personne tentant de s’approcher.
Ceux qui le connaissent disent que Juan José Zúñiga Macías n’était pas un officier exceptionnel ni le premier de sa classe. Ils soulignent cependant qu’il est un expert en renseignement militaire et qu’il connaît très bien les mouvements des différents hommes politiques. Il a été nommé par le président Luis Arce en tant que commandant de l’armée en janvier de cette année.
Zúñiga était proche des mouvements sociaux favorables au gouvernement. Plusieurs dirigeants l’appellent le général du peuple. On le dit également proche des syndicats.
Avant de devenir commandant de l’armée, il était chef d’état-major. Mais à ce poste il a été accusé de détournements de fonds. On peut donc s’interroger sur sa nomination en janvier par Luis Arce.
Détournement d’argent
En effet, en 2013, un rapport officiel a détaillé que Zúñiga était le principal responsable du vol de plus de 2,7 millions de bolivianos, argent qui aurait dû être destiné à la Renta Dignidad et aux indemnités journalières des militaires. Selon le rapport établi le 28 novembre 2013 par le sous-officier Porfirio Quispe, nommé caissier du 23e régiment Max Toledo, à Viacha, l’accusation visait explicitement Zúñiga. Dans le rapport, le sous-officier Quispe affirme que lui et sa famille ont été victimes de menaces de la part de Zúñiga, qui a également été accusé d’être impliqué dans le trafic de drogue par le général Luis Begazo, qui a été suspendu de son poste sans explication.
Du renseignement à la contrebande
Zúñiga est également accusé par ses camarades de faire partie du groupe connu sous le nom de Pachajchos, qui opère à la frontière depuis l’administration de l’ancien président Morales. Selon l’accusation, ces hommes en uniforme, infiltrés dans les unités de renseignement, sont chargés d’introduire des produits de contrebande en grande quantité dans le pays.
En septembre 2022, Morales s’en est pris pour la première fois à Zúñiga et l’a accusé d’être l’exécutant du plan noir contre lui afin de discréditer son image. Depuis, le leader des producteurs de coca accuse le général Zúñiga de faire partie d’un groupe de renseignement qui aurait infiltré le Chapare.
Les Pachajchos sont un groupe de pouvoir au sein de l’armée bolivienne. Il a une grande influence sur la nomination des officiers et pèse lourd dans la lutte contre la contrebande. Cette organisation sélective est dirigée par les échelons supérieurs des forces armées. Des militaires en service actif et passif ont raconté l’histoire et les actions des Pachajchos.
Les Pachajchos ont été créés sous la dernière administration d’Evo Morales. Il s’agit d’un groupe de pouvoir militaire dont la mission principale est le renseignement militaire. Rejoindre cette organisation n’est pas facile. Il faut remplir plusieurs conditions. Le général Zúñiga, lorsqu’il était chef d’état-major de l’armée, a admis l’existence du groupe Pachajchos.
Une situation explosive au plus haut niveau
Le parti au pouvoir en Bolivie, le Mouvement vers le socialisme (MAS), est profondément divisé entre Luis Arce et Evo Morales, autrefois alliés et aujourd’hui adversaires en vue de la présidentielle de 2025. Evo Morales brigue l’investiture au nom du MAS. Morales fut le premier président issu de la majorité indigène de Bolivie. Socialiste idéologique, il a mis en œuvre un programme de réformes radicales après avoir accédé au pouvoir en 2005. Sa popularité initiale s’est érodée après ses tentatives répétées d’abolir la limitation des mandats présidentiels, sur fond d’allégations de corruption généralisée. Arce, 60 ans, un modéré considéré comme un rival de M. Morales au sein du mouvement de gauche du pays, a remporté l’élection présidentielle d’octobre 2020, ramenant le parti socialiste MAS au pouvoir.
Luis Almagro, secrétaire de l’Organisation des États américains, a déclaré que l’armée devait se retirer et “se soumettre au pouvoir civil légitimement élu”.
L’Union européenne, l’Espagne et plusieurs gouvernements régionaux ont également publié des déclarations de soutien au gouvernement élu.
Luis Arce n’a pas encore fait acte de candidature officielle. Il n’est pas idiot de penser, comme plusieurs observateurs, que le général Zúñiga n’ait été qu’un pantin manipulé par un des deux rivaux. Ou les deux en même temps…