Non seulement les Brésiliens ont élu Bolsonaro mais en plus certains se prennent pour des extraterrestres !

Selon les fidèles de Vale do Amanhecer, ils seraient des extraterrestres à forme humaine qui auraient endossé de nombreux rôles « terrestres » : des guerriers spartiates, des princes mayas, des pharaons égyptiens…

 

Non loin de Brasília, se trouve Vale do Amanhecer, la Vallée de l’Aurore. Le lieu de culte est un temple. Il y en a au moins un dans chaque État et plusieurs à l’étranger, notamment au Portugal, aux États-Unis ou au Guyana. Au premier abord, la Vallée de l’aurore est une sorte de parc d’attraction miniature, où les visiteurs peuvent admirer des copies des différentes merveilles du monde sans se déplacer sur les lieux réels. Construit à Planaltina (Goiás), une ville dortoir à proximité de Brasília, la capitale fédérale, le complexe est situé au bord d’un lac. On peut y voir une pyramide, un sanctuaire en forme de vaisseau spatial, un centre de prière à six branches ainsi que plusieurs sculptures de forme elliptique.

La Vallée de l’Aurore se veut le reflet d’une grande diversité de cultes et de civilisations, dont le christianisme, l’hindouisme, le judaïsme, la civilisation inca et l’Égypte antique. Bref de quoi contenter tout le monde ou presque !

D’après les adeptes de la Vallée de l’aurore, des créatures extraterrestres auraient atterri sur Terre il y a 32 000 ans avec pour mission de faire progresser l’humanité. Ces êtres seraient ensuite revenus sur Terre sous de multiples manifestations, au sein de différentes cultures et époques. Selon les membres de la Vallée, appelés « médiums », ils seraient la dernière incarnation des extraterrestres : les jaguars. Pas les autos, les félins.

Planaltina aujourd’hui

La Vallée de l’aurore a été fondée en 1959 par une conductrice de camions, Neiva Chaves Zelaya, également appelée « tante Neiva », veuve et mère de quatre enfants. Elle arrive à Brasília, alors en construction, pour transporter des travailleurs migrants et des matériaux de construction dans son camion. À la fin de 1957, elle commence à avoir des visions. Elle aurait eu des illuminations durant la construction de la nouvelle capitale brésilienne (à la place de Rio de Janeiro). Elle expliqua publiquement, sans même se ridiculiser, qu’elle était régulièrement visitée par des esprits extraterrestres. Neiva a raconté avoir été essentiellement guidée par Pai Seta Branca, ou « père Flèche Blanche », un messager spirituel aujourd’hui représenté comme un chef sud-américain précolombien par des dessins et des statues. Neiva Chaves Zelaya aurait construit les premiers monuments de son site spirituel de ses propres mains, dans une zone rurale de la commune de Planaltina. Petit à petit elle a fait agrandir son campus (c’est le terme employé dans les textes de la secte) et a créé une véritable bureaucratie et une hiérarchie dirigées par elle, son second mari, puis ses fils. Les fidèles ont commencé à être de plus en plus nombreux à partir du milieu des années 1960.

Neiva Chaves Zelaya (1925-1985)

Neiva n’a jamais terminé ses études au-delà du niveau de l’école primaire. Elle a fui la maison familiale pour échapper à la tyrannie de son père. Elle a épousé Raul Alonso Zelaya à l’âge de dix-huit ans, et le couple a rapidement fondé une famille. Six ans plus tard, Raul mourut d’une cirrhose du foie, laissant Neiva seule pour s’occuper de leurs quatre jeunes enfants. Elle a d’abord travaillé comme photographe, mais le contact étroit avec les produits chimiques lui a provoqué des problèmes respiratoires. Après s’être essayée à l’agriculture, elle a acquis un camion et appris à conduire, devenant l’une des premières femmes au Brésil à détenir un permis de conduire professionnel. Au cours des années suivantes, Neiva et ses enfants ont mené une existence nomade, ne s’installant jamais longtemps dans un seul endroit. En 1957, à l’invitation de Bernardo Sayão, le principal ingénieur urbaniste de la construction de la nouvelle capitale qui avait employé son défunt mari, elle a émigré à Brasília pour y travailler comme chauffeur de camion. Pendant le premier mois après leur arrivée, Neiva, les enfants et Gertrude, une adolescente que Neiva avait prise sous son aile, ont vécu dans une tente improvisée à Núcleo Bandeirante avant que Neiva obtienne un logement permanent.

La première photo de Neiva date de 1958 ou 1959. La seconde vers 1980.

La fille de Neiva, Carmem Lúcia Zelaya, a raconté dans ses mémoires que peu de temps après leur arrivée à Brasília, sa mère avait commencé à présenter de graves sautes d’humeur et d’importants troubles du comportement. À tel point que ses enfants durent à plusieurs reprises l’attacher sur son lit pour qu’elle ne casse pas tout à la maison !

Spiritisme à la française

Au Brésil, le spiritisme englobe un certain nombre de mouvements religieux dérivés des enseignements d’Allan Kardec, un pédagogue français du XIXe siècle qui a développé une doctrine sur la médiumnité spirituelle, la réincarnation et le monde des esprits. Les idées de Kardec ont interagi avec d’autres idées ésotériques, ainsi qu’avec des religions d’origine africaine, pour produire l’Umbanda, parfois présentée comme la première religion véritablement autochtone du Brésil pour son panthéon d’esprits représentant un mélange de croyances amérindiennes, africaines et européennes. Dans les années 1950, cependant, les pratiquants des diverses formes de spiritisme étaient encore confrontés à des préjugés sociaux importants, et la plupart des centres spirites étaient des affaires à petite échelle avec peu de visibilité publique. La Vallée de l’Aurore a été la première secte à vraiment avoir un certain succès. Décédée de la tuberculose en 1985, Neiva avait confié la direction de la secte à un de ses fils.

La communauté s’agrandit et met au point des rituels compliqués

L’un des nombreux rituels consiste à chanter de longues heures autour du lac. Lors des rituels, les médiums travaillent généralement par deux. Un apara, ou « médium de bienvenue », a pour mission d’intégrer physiquement un esprit, qu’il soit bénin ou tourmenté, tandis qu’un médium qui prêche se charge d’éduquer l’esprit et de le renvoyer vers le monde spirituel. Selon les fidèles, ces rituels permettent également aux devins d’expier les péchés karmiques de leur vie antérieure.

D’après Kelly Hayes, professeure agrégée de théologie à l’université de l’Indiana, la Vallée de l’aurore, avec ses 800 000 fidèles et ses 600 temples dans le monde, est l’un des mouvements religieux brésiliens qui connaît la croissance la plus rapide. Elle a travaillé sur les conflits entre cette secte et d’autres religions. Les évangéliques ont construit des églises tout autour de la Vallée de l’Aurore. « Les chrétiens évangéliques sont persuadés que les adeptes de la Vallée sont possédés par des forces démoniaques »… Plus on est de fous, etc.

Selon Kelly Hayes, cette religion a d’abord connu un certain succès chez les paysans pauvres et chez les immigrés venus travailler à la construction de Brasília. « Brasília, à cette époque, incarnait le bond vers la modernité pour le Brésil ». Or, cette ville de béton très organisée a pris des airs de dystopie inhospitalière, rongée par la surpopulation et la criminalité élevée. Le « salut spirituel » qu’offre la Vallée a des vertus thérapeutiques pour certaines âmes déçues par la capitale. « Il s’agit surtout de redonner un sens à leur vie », ajoute Kelly Hayes. « Ces récits donnent à de nombreuses personnes le sentiment d’avoir un certain contrôle sur leur vie, que justice et égalité peuvent être obtenues en travaillant dur ». Mais, avertit-elle, c’est une secte, et elle est loin d’être inoffensive. Comme toutes les sectes, elle prospère sur la naïveté, les failles psychologiques et s’adonne à la manipulation la plus grossière.

À l’origine, de cet article, je suis tombé sur un numéro de l’édition brésilienne de la revue National Geographic. Le photographe qui s’est rendu à Planaltina s’appelle Christ ! Ça ne s’invente pas…

 

Voir le site professionnel du photographe Gui Christ ICI (en portugais)

L’histoire complète de Neiva Chaves Zelaya est (en anglais)

Consultez un des articles sur la Vallée dans National Geographic (en portugais), ICI

Fiche Wikipédia d’Allan Kardec (1804-1869),

 

 

Tout prochainement, dans la seconde partie de ce petit dossier (les Brésiliens et les extraterrestres), je vais vous présenter

Antonio Villas Boas,

le gars qui avait été enlevé par des extraterrestres humanoïdes. En attendant vous pouvez lire ou relire 

Varginha: Café et soucoupes (volantes)