Une tour de crânes humains découverte à Mexico
C’est l’une des plus grandes découvertes archéologiques de ces dernières années au Mexique.
D’importantes découvertes continuent d’être effectuées à Mexico, situé au même endroit que Tenochtitlan, l’ancienne capitale de l’empire aztèque. Le gouvernement mexicain a annoncé la découverte d’une sorte de tour constituée en partie de 120 crânes humains.
Ces crânes constituent la partie nord-est d’une tour baptisée Huei Tzompantli. Ils viennent s’ajouter aux 484 crânes découverts sur le site il y a plusieurs années. Les archéologues estiment que cette structure a été construite entre 1486 et 1502, pendant le règne du Tlatoani Ahuitzotl. Tlatoani est le titre du plus haut dirigeant de Tenochtitlan. Ahuitzotl en était donc le dirigeant lorsque Christophe Colomb a posé pied dans les Caraïbes. C’est son successeur qui verra arriver les conquistadors.
Sacrifices humains
Ces restes faisaient donc partie, d’après l’Institut national mexicain d’anthropologie et d’Histoire d’un Tzompantli, d’un mur constitué de crânes empalés à l’horizontale et du Templo Mayor. « Si on ne peut pas dire combien de ces personnes étaient des guerriers, certaines étaient peut-être des prisonniers destinés aux sacrifices cérémoniels », explique l’archéologue Raul Barrera.
Templo mayor
Une partie de ces ossements appartenaient à des femmes, et au moins trois à des enfants. Ils constituaient donc une tour faisant partie du Templo Mayor, le centre religieux de Tenochtitlan.
Le temple fut détruit par les conquistadors, comme la plupart des installations religieuses de la ville. Les sacrifices humains étaient en effet l’une des raisons invoquées par les Espagnols pour justifier la destruction de l’empire aztèque. La structure, appelée Huei Tzompantli, a été découverte pour la première fois il y a cinq ans par des archéologues du Programme d’archéologie urbaine (PAU) de l’Institut national d’anthropologie et d’histoire du gouvernement mexicain (INAH).
Aujourd’hui, les archéologues ont déclaré avoir trouvé 119 crânes humains supplémentaires dans le côté est de la tour, selon un communiqué de l’INAH. On pense que c’est l’une des sept collections de crânes qui se trouvaient dans la capitale aztèque Tenochtitlan. Un total de 484 crânes avait déjà été identifié sur le site, qui, selon les archéologues, remonte à au moins une période comprise entre 1486 et 1502. « Bien que ces individus constituent un échantillon important de la population de la période postclassique, note l’archéologue Lorena Vázquez Vallín, chacun de ces crânes forme un élément architectural qui fait partie du bâtiment et de son discours symbolique ». Par ailleurs, Raúl Barrera Rodríguez explique que ces fouilles sont le résultat de la collaboration entre l’INAH et les propriétaires privés, ce qui a permis l’investigation et la sauvegarde de cet important patrimoine archéologique.
Capture d’écran sur CNN
L’INAH indique que la construction des tours faisait partie des « pratiques culturelles et identitaires » des Aztèques. « Nous savons que les crânes ont tous été rendus sacrés. Transformés en cadeaux pour les dieux ou même en personnifications des divinités elles-mêmes », a déclaré l’archéologue Raul Barrera.
De nombreuses structures construites par les Aztèques dans la ville de Tenochtitlan, aujourd’hui Mexico, ont été détruites après que la ville soit passée sous le contrôle des soldats espagnols et des alliés autochtones dans les années 1500. En conséquence, de nombreuses tours de crâne de la région ont été rasées et des fragments épars ont depuis été récupérés par des équipes d’anthropologie. Malgré leur destruction, ils ont laissé une impression durable sur ceux qui en ont été témoins, les conquistadors Hernán Cortés et Bernal Díaz del Castillo les mentionnant dans les écrits de leurs conquêtes.
Le Grand Temple était le nom de la grande pyramide à degrés de Tenochtitlan, la capitale des Aztèques, ainsi que du centre cérémoniel. Après la conquête espagnole, le Templo Mayor fut donc détruit et son emplacement exact oublié. Il a été redécouvert en 1978 suite à des travaux urbains au cœur de l’actuelle capitale mexicaine. Pour exhumer le site du Grand Temple, les archéologues ont fait raser des immeubles, des magasins et coupé une artère de la capitale mexicaine. Des fouilles ont mis en évidence treize phases de construction, étalées entre 1375 et 1519, notamment celle du double escalier de la pyramide, haute de 45 mètres. Le Templo Mayor ne nous a longtemps été connu que par les témoignages des chroniqueurs du XVIe siècle (en particulier Bernal Díaz del Castillo et Bernardino de Sahagún). D’après Jacques Soustelle, ethnologue américaniste* la chronique la plus crédible est celle de Cortés, qui indique que le centre cérémoniel du Templo Mayor comportait une quarantaine de bâtiments publics.
La vie plutôt que la mort
Il y a cinq ans, des chercheurs du Programme d’archéologie urbaine (PAU), de l’Institut national d’anthropologie et d’histoire (INAH), ont localisé les vestiges de l’extrême nord-est du Huei Tzompantli de México-Tenochtitlan, la grande plate-forme à palissade consacrée à Huitzilopochtli, le dieu tutélaire. En décembre 2020, à la suite du suivi que l’Institut fournit aux travaux de rénovation du bâtiment historique de la rue República de Guatemala, les archéologues ont localisé l’extrémité est et la façade extérieure de cette tour ou mur circulaire de crânes humains, haut de 4,7 mètres. « À chaque étape, le Templo Mayor continue de nous surprendre et le Huei Tzompantli est, sans aucun doute, l’une des découvertes archéologiques les plus impressionnantes de ces dernières années dans notre pays, car c’est un témoignage important de la puissance et de la grandeur auxquelles le Mexique-Tenochtitlan a atteint », a déclaré la secrétaire à la Culture du Mexique, Alejandra Frausto Guerrero. Jusqu’à présent, les chercheurs de PAU sont descendus à une profondeur de 3,5 mètres sous le niveau actuel de la rue República de Guatemala, parvenant à identifier trois étapes de construction de la plate-forme Mexica, qui remontent, au moins, à l’époque du tlatoani Ahuízotl, qui dirigea Tenochtitlan entre 1486 et 1502.
La tour des crânes est pour nous une vision incompréhensible de notre système de croyances, mais les Aztèques faisaient du Huei Tzompantli un monument de vie plutôt que de mort, puisqu’il s’agissait par les sacrifices de maintenir l’existence de leur monde connu.