Le tueur a été assassiné : clap de fin pour « Dexter »
Le tueur en série Pedrinho Matadora a été assassiné le dimanche matin 5 mars, à Mogi das Cruzes, dans l’agglomération de São Paulo. Selon la police civile, il a été blessé par balles. Pour faire bonne mesure, il a été décapité avec un couteau de cuisine alors qu’il était encore vivant…
Pedro Rodrigues Filho alias Pedrinho Matadora (Petit Pedro le Tueur) s’est fait connaître dans les années 1970 et 80. C’était un tueur en série. Mais d’un genre spécial. Il disait tuer des assassins, des violeurs, des trafiquants de drogue (même s’il en fut l’un des plus puissants, des violents et acariâtres de tout poil. Arrêté une première fois le 24 mai 1973, il est condamné à 128 ans de prison. Durant sa détention, il tue plusieurs codétenus. Avant celle-ci, il aurait assassiné plus d’une trentaine de personnes. La justice a dénombré 71 victimes confirmées, pour toute sa « carrière ». Après 34 ans d’incarcération, il est libéré le 24 avril 2007. Il s’installe à Fortaleza, dans le nord-est du pays. Il est arrêté de nouveau pour séquestrations et meurtres (combien ?) le 15 septembre 2011.
Pedrinho Matadora s’est lancé très tôt dans la carrière criminelle, d’où sans doute son sobriquet. À 11 ans, il exécute un trafiquant de drogue (Jorge Galvão), son frère et son beau-frère, à Itaquera, zone Est de São Paulo. On n’a jamais su si c’était de sa propre initiative ou s’il s’agissait de son premier contrat de tueur à gages. C’était un garçon plutôt chétif qui avait du mal à tenir un semi-automatique. D’ailleurs en le voyant pour la première fois, les policiers eurent du mal à croire que le gamin était un matador.
Quelques mois plus tard, il tua le maire de Santa Rita do Sapucaí, dans le sud de l’État de Minas Gerais. Là on sait pourquoi : l’idylle avait viré son père, gardien d’école, accusé d’avoir volé un casse-croûte à un de ses collègues. Mais notre brave justicier avait tiré avant d’enquêter. Il s’avéra que c’était un autre gardien le coupable. Qu’à cela ne tienne, le petit Pédro descendit le voleur à coups de fusil à pompe.
À partir de là les autorités ont du mal à comptabiliser tous ses meurtres. Vraisemblablement entre 75 et 110 sans inclure ses victimes en prison.
Il balance son cousin dans le broyeur de cannes à sucre…
Pedro s’est enfui de chez lui, à Mogi das Cruzes, à l’âge de 9 ans parce qu’il ne supportait plus son père ivre qui battait sa mère. « J’étais enfant, je travaillais avec mon grand-père, et mon premier crime a été de jeter un cousin dans le broyeur de cannes à sucre. Il m’avait donné un coup de poing dans l’œil et un coup de pied parce que j’avais emprunté son cheval pour faire une promenade ». Le cousin survécut. Estropié à jamais. Pedrinho vécut ensuite de rapines, puis de vols de plus en plus importants et de divers trafics. Drogues, armes, véhicules… et de meurtres pour le compte de quelques commanditaires dont certains furent par la suite ses victimes. Puis il braqua des pharmacies et des banques avant de se lancer dans le trafic de drogue en professionnel, non sans avoir éliminé la plupart de ses concurrents. Il va jusqu’à vivre en concubinage avec la veuve d’un parrain, la Botinha (Petite Botte).
Pour échapper à la police, il disparaît un temps tout en dirigeant ses affaires de plus en plus importantes à distance. On le revoit à São Paulo où il rencontre Maria Aparecida Olímpia. C’est le grand amour. Elle est enceinte et Pedro songe à se ranger, mais un de ses rivaux assassine Maria. Fou de chagrin, il cherche à se venger. Avant de trouver le coupable, il supprime plusieurs trafiquants de drogue. Finalement, l’un d’entre eux, pour échapper à la mort (croit-il) parle et dénonce le commanditaire du tueur de Maria. Il localise ce dernier. Il l’espionne et, alors que le trafiquant en question se rend à une fête de mariage, Pedro et ses hommes envahissent les lieux. Bilan : une demi-douzaine de morts (dont les jeunes mariés) et une vingtaine de blessés. Il paraît que le corps de l’assassin recherché était méconnaissable. Pedro lui avait vidé le chargeur de sa sulfateuse en plein visage.
En 1973, donc, case prison. Il n’a pas 20 ans. Au pénitencier, il retrouve son père. Il le bute. « Il a poignardé ma mère 21 fois, alors je lui ai donné 22 coups de couteau. Logique. Un rapport psychiatrique le dit asocial et colérique, le fils, pas le père. Surprenant…
Bref, on le transfert dans un autre établissement. Il en profite pour étrangler son compagnon de voyage. “Un violeur”. Tous les deux étaient menottés.
Arrivé à la maison de détention de Taubaté, considérée à l’époque comme la plus sûre du Brésil, il y découvre l’assassin de sa sœur. Il l’émascule et l’égorge. On pense qu’en prison il a tué au moins 48 personnes (jamais de gardiens) en plus de celles assassinées de ses mains à l’extérieur.
Toujours est-il que Pedro mena une longue carrière de tueur en série. On estime qu’il fut le plus grand criminel (de sang) du Brésil de tous les temps. Dans un pays réputé très violent, ce n’est pas rien !
L’experte brésilienne en criminologie, Ilana Casoy, a déclaré que Pedrinho n’était pas un justicier, mais un vengeur qui tuait ceux qu’il considérait comme les pires de la société. Il n’aurait jamais tué de femmes ni d’enfants. Jamais violé. Ce qui lui donna une certaine popularité.
Toujours est-il que le célèbre tueur en série, âgé de 68 ans, a été tué sur le trottoir devant le domicile familial où il ne vivait pas, un dimanche matin, à Mogi das Cruzes, dans l’agglomération de São Paulo, à quelques mètres de la maison où il était né.
Deux hommes ont fait irruption d’une voiture noire et lui ont d’abord tiré dessus et l’ont ensuite soigneusement décapité. La police a trouvé le véhicule abandonné à une vingtaine de kilomètres, mais pas les tueurs. Les témoins ont dit qu’ils portaient des masques de Joker (le film). Car il y a eu des témoins, notamment une cousine de Pedro. Elle était assise devant la maison. L’un des tueurs lui aurait ordonner de rentrer avec sa fille en précisant que “ça ne la regardait pas”. Aux premiers coups de feu, la victime s’est écroulée. C’est au sol que l’un des assassins l’a décapité. Pas complétement, a précisé un voisin ayant sans doute le goût du détail sordide. Les deux hommes sont remontés dans leur auto, une petite Volkswagen noire.
Pedro Rodrigues Filho aurait inspiré Jeff Lindsay, écrivain américain, pour son personnage porté à l’écran, Dexter Morgan.
Pedro était un adepte des réseaux sociaux et il alimentait une chaîne YouTube. D’ailleurs, la veille de sa mort, le samedi 4 mars, on pouvait le voir jouer au billard dans un bar du coin.