Un système dense de centres urbains préhispaniques a été découvert dans la vallée d’Upano, en Équateur amazonien, dans les contreforts orientaux des Andes. Le travail sur le terrain et l’analyse par détection et télémétrie par ondes lumineuses (LIDAR) ont révélé un paysage anthropisé avec des groupes de plates-formes monumentales, des places et des rues suivant un modèle spécifique entrelacé avec de vastes drainages et terrasses agricoles ainsi que de larges routes droites sur de grandes distances. Les fouilles archéologiques datent l’occupation d’environ 500 avant notre ère à entre 300 et 600 après notre ère. La caractéristique la plus remarquable du paysage est le système routier complexe qui s’étend sur des dizaines de kilomètres, reliant les différents centres urbains, créant ainsi un réseau à l’échelle régionale. Un tel développement précoce en Haute Amazonie est comparable à des systèmes urbains mayas similaires récemment mis en évidence au Mexique et au Guatemala.

Cette découverte modifie ce que nous savons de l’histoire des populations vivant en Amazonie.

Les maisons et les places de la région d’Upano, dans l’est de l’Équateur, étaient reliées par un étonnant réseau de routes et de canaux.

La région se trouve à l’ombre d’un volcan qui a créé des sols locaux riches, mais qui a peut-être aussi conduit à la destruction de la société.

Si nous connaissions l’existence de villes sur les hauts plateaux d’Amérique du Sud, comme le Machu Picchu au Pérou, nous pensions que les gens ne vivaient que de manière nomade ou dans de minuscules campements en Amazonie.

C’est une découverte qui, selon ses auteurs, remet en question ce que nous pensions savoir de l’histoire des peuples vivant en Amazonie. Des archéologues ont mis en évidence l’existence d’un vaste réseau de cités antiques caché depuis des milliers d’années dans la végétation luxuriante amazonienne. Remontant à 500 avant notre ère, cet ensemble de cités-jardins reliées par des routes et des canaux mis au jour, se situe le long de la rivière Upano, à l’ombre d’un volcan, en Équateur, révèle une étude internationale, publiée dans la revue Science. On y apprend notamment qu’au moins 10 000 agriculteurs y vivaient, voire 100 000, il y a environ 2500 ans, et ce, durant près de 1000 ans. « Ce site est plus ancien que tous ceux que nous connaissons en Amazonie. Nous avons une vision eurocentrique de la civilisation, mais cela montre que nous devons changer notre conception de la culture et de la civilisation », déclare le professeur Stephen Rostain, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique en France, qui a dirigé les recherches (CNRS).

« Cela change notre vision des cultures amazoniennes. La plupart des gens imaginent de petits groupes, probablement nus, vivant dans des huttes et défrichant la terre. Cette découverte montre que les peuples anciens vivaient dans des sociétés urbaines complexes », explique Antoine Dorison, coauteur de l’étude.

La ville a été construite il y a environ 2 500 ans et des personnes y ont vécu jusqu’à 1 000 ans, selon les archéologues. Il est difficile d’estimer avec précision le nombre de personnes qui y ont vécu à un moment donné, mais les scientifiques affirment qu’il s’agit certainement de 10 000, voire de 100 000 personnes.

Les archéologues ont combiné des fouilles au sol avec une étude d’une zone de 300 km2 à l’aide de capteurs laser pilotés par un avion qui ont pu identifier les vestiges de la ville sous les plantes et les arbres denses. « Le réseau routier est très sophistiqué. Il s’étend sur une grande distance, tout est connecté. Et il y a des angles droits, ce qui est très impressionnant », dit-il, expliquant qu’il est beaucoup plus difficile de construire une route droite qu’une route qui s’intègre au paysage.

Il pense que certains avaient une « signification très puissante », peut-être liée à une cérémonie ou à une croyance.

Les scientifiques ont également identifié des chaussées avec des fossés de chaque côté qui, selon eux, étaient des canaux permettant de gérer l’eau abondante dans la région.

Il y avait des signes de menaces pour les villes, certains fossés bloquaient les entrées des colonies et pouvaient être la preuve de menaces de la part des populations voisines.

Les chercheurs ont trouvé les premières traces d’une ville dans les années 1970, mais c’est la première fois qu’une étude complète est réalisée, après 25 ans de recherche.

Il révèle une société vaste et complexe qui semble encore plus importante que les sociétés mayas bien connues du Mexique et de l’Amérique centrale.

« Imaginez que vous découvriez une autre civilisation comme les Mayas, mais avec une architecture, une utilisation du sol et une céramique complètement différentes », explique José Iriarte, professeur d’archéologie à l’université d’Exeter.

Certaines découvertes sont « uniques » pour l’Amérique du Sud, explique-t-il, comme les plates-formes octogonales et rectangulaires disposées les unes à côté des autres.

Les sociétés étaient manifestement bien organisées et interconnectées, explique-t-il, en mettant en évidence les longues routes creusées qui reliaient les établissements entre eux.

On ne sait pas grand-chose des peuples qui y vivaient et de leurs sociétés.

Des fosses et des foyers ont été trouvés dans les plates-formes, ainsi que des jarres, des pierres pour moudre les plantes et des graines brûlées. Les peuples Kilamope et Upano qui y vivaient se sont probablement concentrés sur l’agriculture. Ils se nourrissaient de maïs et de patates douces et buvaient probablement de la « chicha », une sorte de bière sucrée.

Le professeur Rostain explique qu’il a été mis en garde contre ces recherches au début de sa carrière, car les scientifiques pensaient qu’aucun groupe ancien n’avait vécu en Amazonie…


Sources : Science, 24 Horas, archives personnelles